mardi 22 juillet 2008

1. en quoi la représentation cinématogrpahique est elle apte à servir l'architecture?


L’architecture a souvent été une grand sujet de questionnement dans la représentation au cinéma : du décor à la rue ces choix ont souvent participé à la construction des plus grands films. Mais inversement, l’approche cinématographique du monde, par son traitement direct du réel et donc de sa compréhension, ne pourrait il pas servir à la conception architecturale ?

Nous ne vivons pas dans un monde objectif, mais dans un monde de perception subjective. Dans l’expérience de l’espace vécu, la mémoire et le rêve, les sensations et les désirs, les valeurs et les significations fusionnent avec la perception du monde. Ce sont ces paramètres dont le repère est le rapport spatio/temporel qu’il s’agirait d’inclure dans la conception architecturale. Car Qui sommes-nous, qu’est chacun de nous sinon une combinaison d’expériences, d’informations, de lectures, de rêveries ? Chaque vie est une encyclopédie, une bibliothèque, un inventaire d’objets, un échantillonnage de styles, où tout peut se mêler et se réorganiser de toutes les manières
possibles(1). L’architecture ou plutôt la manière dont l’usager y vit, ne doit pas elles rendre compte des ces richesse humaines, combinable à l’infini ? L’architecture au service de ses usagers ne pourrait elle pas être au delà du simple objet, un objet de médiation ? Ces expériences intégrés à l’espace architectural, que l’on pourrait appeler l’espace vécu, sont représentable en architecture? Aujourd’hui, les représentations de l’architecture sont établies selon une géométrie euclidienne. Le plan, la coupe et l’élévation en sont les représentations les plus fidèles. Comment y représenter l’espace vécu ? Un rapport qui transcende les règles de la géométrie.
L’espace vécu ressemble aux structures du rêve et de l’inconscient, organisé indépendamment des frontières des espaces physiques et du temps(2). Comment grâce aux outils de représentations conventionnelles arriver à une interprétation de cet espace/temps ?

Dans The work of Art in the Age of Mechanical Reproduction, Walter Benjamin délibérait à propos d’un rapprochement entre le cinéma et l’architecture en disant que malgré leurs apparences visuelles ces deux formes d’art étaient en fait deux supports tactiles. L'idée de Walter Benjamin suggère que, malgré la situation physique du spectateur face à l’écran qui transforme ce dernier en un observateur physiquement passif, l'espace virtuel cinématographique donne au spectateur, de manière inconsciente, une expérience sensorielle et motrice de puissantes expériences kinesthésiques. Un film peu être vu avec les muscles et la peau autant que par les yeux. Ainsi le spectateur, malgré sa position « passive » face à l’écran, deviendrait acteur dans la compréhension de l’espace et des éléments qui le compose. L’architecte intégrant le paramètre espace/temps à son projet pourrait alors transformer le simple usager en acteur participant au fonctionnement de l’architecture.

Walter Benjamin comparait la peinture à la magie, et le cinéma à la chirurgie(3). La peinture agit à distance, par l’aura de l’oeuvre. Le cinéma, lui, découpe, monte, raccorde, greffe, reconstruit, plongeant les mains directement dans les entrailles du réel. Cette interprétation est revisité par J.Pallasmaa(4), où elle compare alors le magicien au cinéaste et l’architecte au chirurgien : Le réalisateur est le magicien qui évoque une situation vécue à partir d'une distance pour un récit virtuel d'images projetées, tandis que l'architecte fonctionne avec la réalité physique, à l’intérieur même des intestins de la construction que nous peuplons.
La représentation cinématographique apparaît comme le medium le plus « dépendant » des attitudes humaines, aptes à représenter tout élément dans un repère spatio/temporel. L’idée serait donc d’inclure dans la conception architecturale ce paramètre liant l’usager et son rapport au temps.
En premier lieu, il s’agira d’étudier un film, Time Code (1999) de Mike Figgis autour de sa représentation de l’espace/temps. En second lieu, il s’agira « d’explorer » le projet de la bibliothèque de Jussieu (1992) par Rem Koolhaas, selon les mêmes « soucis » de compréhension et de représentation de la notion d’espace/temps que pour Time Code.

L’hypothèse est de dire qu’après coup, le traitement du rapport espace-temps dans la bibliothèque de Rem Koolhaas a été pensé selon la même logique de représentation que dans Time Code.
A la fois dans le film de M.Figgis que dans l’architecture de Rem Koolhaas, le concept vise à l’interprétation des usagers, d’une même logique spatio/temporelle : Un espace déterminé mais polymorphe, autonome dans sa structure mais dépendant des éléments qui y habitent.





1 Italo Calvino, Leçons américaines, aides mémoires pour le prochain
millénaire, Gallimard, 1988
2 Juhani Pallasmaa, the Architecture of Image: Existential Space in
Cinema, Rakennustieto Oy, 2001
3 Walter Benjamin, “L’OEuvre d’art à l’époque de sa reproduction
mécanisée”, in Ecrits français, Gallimard, 1991, § XVIII, p. 168. L’auteur
prend fait et cause pour les arts qui ont la reproduction pour principe, la
photographie puis le cinéma, s’exposent sans réserve aux masses et
libèrent l’art du “rituel” dans le secret duquel seuls sont admis les initiés. La
peinture, qui est au cinéma, écrit Benjamin, ce que la magie est à la
chirurgie, est l’emblème de l’art auratique.
4 Juhani Pallasmaa, the Architecture of Image: Existential Space in
Cinema, Rakennustieto Oy, 2001

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Great work.